En cette période trouble, le consumérisme n’a pas dit son dernier mot, mais la fameuse sortie de piste du publicitaire Jacques Séguéla, établissant un lien direct entre la possession d’une montre haut-de-gamme et la réussite de sa vie nous semble appartenir à une époque d’un autre âge. Le schéma de réussite passé : gros salaire, grosse voiture, etc. devient de plus en plus un schéma du passé et c’est tant mieux. Il faut réinventer la réussite. N’est-ce pas plus important d’avoir une vie sociale, familiale épanouie ? D’avoir un travail qui a un sens ? De se sentir utile à la société ?
En effet, il ne se passe pas une seule semaine sans que la presse locale ou nationale ne se fasse l’écho de jeunes diplômés issus de grandes écoles de commerce ou d’ingénieurs qui, après quelques années d’expérience dans des cabinets de conseil ou d’audit, choisissent de “déconstruire” leur parcours pour se lancer dans des projets nettement moins lucratifs, d’agriculture bio, de créations artisanales, ou de réhabilitation de bâtiments, après avoir éventuellement suivi une formation complémentaire.
Sans atteindre nécessairement cette radicalité dans la rupture avec le parcours anticipé initialement, la quête de sens de nombreux jeunes les pousse à sélectionner les structures pour lesquelles ils comptent travailler. Ils boycottent ainsi les entreprises qui ne sont pas conformes à leurs valeurs, ainsi que l’atteste notamment le manifeste pour un réveil écologique signé par plus de 30 000 étudiants désireux de prendre en main leur avenir et d’intégrer les questions écologiques (https://pour-un-reveil-ecologique.org/fr/).
Ces évolutions démontrent que toute une jeunesse est disposée à s’affranchir des marqueurs traditionnels de la réussite sociale pour construire par elle-même un parcours porteur de sens. Nous nous en réjouissons.
Pour autant, cette libre construction de parcours hors normes est le plus souvent le fait de jeunes maîtrisant parfaitement de prime abord les codes socio-professionnels et disposant de filets de protection liés à leurs compétences initiales et à leur environnement familial.
Pour les jeunes moins qualifiés, titulaires d’un unique CAP, voire non diplômés, les parcours sont bien plus figés et il est bien plus rare qu’ils puissent déployer leurs talents, comme ils le souhaiteraient, car les institutions, telles que les banques, ne leur font pas confiance. Le plus souvent également, les pouvoirs publics ne les tiennent pas informés des débouchés et passerelles existantes, en particulier dans le domaine de la transition écologique.
A Nanterre, au sein de la majorité municipale, et avec l’ensemble de nos partenaires, notre priorité est de continuer de valoriser la pluralité et la libre construction des parcours, en donnant des points d’appuis à tous les porteurs de projets, notamment aux sans-papier, potentiels fers de lance de l’économie locale, comme l’ont compris il y a déjà quelques années les autorités allemandes que l’on ne peut pourtant pas soupçonner d’angélisme. Ces derniers savent se démarquer par leur capacité entrepreneuriale, mais surtout ils se distinguent par leurs “innovations frugales”, née d’une sobriété contrainte liée à leur histoire et dont le pari est de la transformer en sobriété heureuse et choisie. Pour les accompagner, au-delà des dispositifs mis en place, nous gagnons à multiplier la formalisation de tiers lieux originaux, à l’image de Vive Les Groues ou de l’expérimentation des Grands Voisins à Paris, pilotés par des structures chargées de coordonner efficacement l’ensemble de ces acteurs. Ces structures peuvent s’épanouir dans l’écosystème Nanterrien doté notamment d’acteurs éducatifs soucieux de tirer le meilleur parti des initiatives issues des Programmes de Réussite Éducative et de la Cité éducative, de budgets participatifs avec un volet jeunesse, et d’un poste budgétaire consacré aux subventions significatif de notre engagement solidaire. Enfin, dans cette perspective d’ouverture et dans la continuité du travail partenarial engagé avec l’Université Paris Nanterre depuis le début du mandat, veillons à multiplier les synergies sur tout projet novateur avec les étudiants de cette institution pivot, reconnue internationalement, de notre ville.