Le samedi 28 janvier, l’association Les amis de l’école d’architecture réunissait une cinquantaine de personnes – architectes, associations et habitants du quartier ainsi que quelques élus, dont le sénateur Europe Ecologie-Les Verts André Gattolin – pour discuter de l’avenir de ce bâtiment exceptionnel laissé à l’abandon depuis maintenant huit ans.
A deux pas du RER Nanterre-Préfecture, cet établissement, quasi invisible et peu connu des Nanterriens eux-mêmes, est pourtant idéalement situé en bordure du parc André-Malraux, participant d’un ensemble architectural et urbanistique insuffisamment mis en valeur qui s’étend de l’immeuble Liberté, du même architecte Jacques Kalisz, en passant par le foyer international des musiciens Maurice-Ravel, jusqu’aux tours d’Emile Aillaud, autre projet humaniste d’architecture dont l’idée directrice était de favoriser le vivre-ensemble et la solidarité. Cet ensemble fait une transition en douceur entre le quartier très minéral et plutôt froid de la cité de bureaux autour de la station RER et les grands espaces végétaux du parc qui le relient au Théâtre des Amandiers puis au reste de la ville. L’école elle-même était pensée comme un espace ouvert sur l’extérieur, lieu de passage et d’échanges entre étudiants et population voisine, autant que vers l’intérieur, entre les différentes disciplines de l’architecture et les divers niveaux d’études. Le caractère patrimonial de cet espace, témoin d’une architecture des années 1970 utilisant l’acier, est évident. Son emplacement aux portes de la Défense et sa portée culturelle lui donnent une dimension régionale, voire métropolitaine, autant que locale.
Les négociations entre le ville et l’État butent sur le montant encore élevé, près de 7 millions d’euros, demandé pour le rachat par la ville et sur la condition posée par la préfecture de créer 10 000 m² de logements, ce qui reviendrait à raser le bâtiment et de reconstruire sur l’emplacement. Or une réhabilitation de l’existant – mais il ne faudrait pas le laisser se dégrader davantage – semble possible techniquement et financièrement, avec un peu de volonté politique et l’élaboration de projets viables.
Parmi les pistes suggérées, une mutualisation des locaux réservant le rez-de-chaussée à des services socio-culturels à destination des habitants,les étages étant répartis entre archives de l’Institut français d’architecture actuellement situées à Provins et le Fonds régional d’art contemporain d’Ile-de-France. Ainsi la vocation culturelle du bâtiment, et son rayonnement tant local que métropolitain se verraient-ils affirmés avec pertinence.
Il est maintenant urgent de faire avancer ce projet ou en faire naître d’autres, sous l’impulsion de la municipalité en particulier, mais aussi avec une meilleure volonté politique de l’Etat pour ne pas effacer d’un trait cet héritage culturel au sein de notre commune. C’est en ce sens que notre sénateur André Gattolin a proposé de déposer une question écrite au gouvernement.
2 réflexions au sujet de “Quel avenir pour l’ancienne école d’architecture de Nanterre ?”
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L’article souligne une transition environnementale concernant cette école située entre le quartier du Parc-Nord et le parc départemental.
Je me permets d’y ajouter une transition sociologique situant l’école d’architecture à la frontière du Parc-Sud et du Parc-Nord. Il s’agit de la limite géographique entre la cité sensible dénommée « cité Picasso » et un quartier mixte où sont implantés beaucoup de bureaux.
Voulant lutter contre une ville à deux vitesses, j’avais demandé à Michel Laubier, maire-adjoint qui présentait le projet des Terrasses, quels aménagements urbains étaient prévus pour faire la transition avec les cités voisines. Réponse : « rien n’est prévu ».
Dix ans plus tard, il s’en est suivi une zone de non-droit : le Parc-Sud, un quartier assisté entouré d’autres quartiers, dont le Parc-Nord, l’école d’architecture se situant à la frontière.
Concrètement, l’association « Proxité » qui parraine plus de 40 ados et d’autres plus âgés en recherche d’un premier emploi, s’est implantée à proximité de l’école d’architecture et du collège Paul-Eluard (salle Le Corbusier)… mais elle a du déménager partiellement sur les Terrasses pour échapper à la loi des jeunes marginaux qui pénétraient dans la salle, embarquant au passage les ordinateurs portables à portée de la main.
Des histoires comme celle-là m’ont incité à proposer, lors des réunions de concertation avec les habitants au sujet du devenir de l’école d’architecture, qu’elle soit transformée en « palais de la jeunesse » comme il en existe à Puteaux, version Nanterre, en reprenant les arts populaires comme le hip-hop (développé à Suresnes), en décentralisant les activités de la Maison de la Musique, en introduisant l’enregistrement son, la vidéo, le sport en salle… Les comptes-rendus des réunions n’en ont pas parlé. J’ai été censuré de même que d’autres personnes ayant fait des propositions analogues (selon les habitudes municipales lorsque les propositions ne vont pas dans le bon sens).
Je ne suis pas attaché au projet esquissé ci-dessus, mais à la nécessité de tenir compte, sur le plan de l’aménagement urbain, de l’urgence d’intégrer une population trop longtemps mise à l’écart, en particulier la jeunesse en difficulté. On peut continuer à l’ignorer, mais au bout du compte on récolte le non-droit, la violence, la drogue, un nombre important de jeunes en perdition …
Il s’agit-là d’une question institutionnelle. La preuve est faite qu’on peut implanter autant d’associations que l’on voudra dans le quartier, cela n’y changera rien : je constate, malgré vingt ans de développement associatif, que la situation continue à se dégrader et à se durcir (c’est comme les ONG dans le tiers-monde : elles sont indispensables mais elles ne remplacent pas les investissements institutionnels).
S’agissant d’investissements lourds, le devenir de l’école d’architecture est principalement entre les mains des élus. Le projet retenu constituera un choix politique sur la façon de développer ce secteur de Nanterre : sera-t-il harmonieux ou continuera-t-on à construire « des mondes à part » ?
Les Verts-EE s’intéressent au Parc-Sud, c’est pourquoi je me permets de dire qu’il est légitime de se soucier de l’environnement et de la culture, mais nous ne devons pas les déconnecter de l’urgence sociale, à savoir l’urgence d’intégrer la population de ce secteur et l’urgence de ne plus laisser dériver une partie de la jeunesse.
Jean-Pierre Bardeau
Cette intervention de Jean Pierre Bardeau témoigne d’une capacité à appréhender la problématique d’une mutation urbaine ou d’un immeuble bâti existant ,obsolète et vide depuis 8 ans , avec une certaine maturité et sans simplisme réducteur .
Mais il existe certainement une autre destination possible pour ce site que résidentielle ou associative , dont l’impact sur la vie sociale du quartier sera tangible .
Le premier et le vrai scandale social de ce site n’est pas l’hypothèse d’une démolition de l’oeuvre architecturale « métal » ( par ailleurs contestée , bien qu’indéniablement marquée 70 ) mais son absence de destin et de réemploi depuis trop longtemps. Les ressources publiques sont devenues trop rares pour ne pas être convenablement exploitées .